Chaire de Danièle Linhart #1 : De Taylor au management moderne : le travail aliéné

Lire la vidéo

Cette conférence était la première d’une série de trois conférences données par Danièle Linhart, titulaire de la chaire de sociologie de l’Institut La Boétie. Elle s’est inscrit dans le cadre de la consultation de l’Institut La Boétie sur le travail.

De Taylor au management moderne : le travail aliéné

La souffrance au travail est loin d’être abolie. Les souffrances physiques sont en augmentation. Mais aussi l’isolement, la perte de sens, et le sentiment d’être perdu face aux injonctions changeantes des directions et au cruel manque de marge de manœuvre. Même chez les cadres, les offres d’emplois proposent cours de sport, massages et sessions de team building, mais rares sont les postes qui offrent formations et autonomie.

Pour la sociologue du travail Danièle Linhart, cette situation doit beaucoup au « taylorisme ». Elle écrit : « Taylor avait identifié le fait qu’au sein des entreprises, le savoir, c’est aussi le pouvoir ». Cette doctrine d’organisation du travail, qui se veut « scientifique », repose sur deux principes. Une division horizontale du travail, où chaque travailleur répète un nombre réduit de tâches, d’une part. Et une division verticale, où ceux qui conçoivent les objets et les méthodes ne sont pas ceux qui les réalisent d’autre part. Elle cherche l’efficacité maximale, quitte à contrôler la vie privée des salariés pour s’assurer de leur total engagement. L’un de ses objectifs est de déposséder les travailleurs de ce qui fait leur force : leur métier et leurs connaissances. Ce transfert de savoir vers les cadres et la direction permet de mettre les salariés au service non pas de leurs valeurs et intérêts propres, mais au service des profits de l’entreprise et de l’enrichissement de leur employeur.

Cette idéologie et technique de pouvoir dans la sphère économique, apparue au début du 20ème siècle, est encore à l’œuvre aujourd’hui dans les entreprises. Pour Danièle Linhart, on la retrouve désormais dans ce que l’on nomme le management. Les salariés sont dé-professionnalisés, et leurs savoirs sont externalisés dans les directions et les cabinets de conseil. Leur engagement maximal est assuré à travers leur isolement, et le contrôle de leur vie privée et de leur santé. Il est également présent dans le style de gouvernement, autour de l’idée qu’il faut “gérer” les masses, et les discipliner.

Cette première chaire était l’occasion pour Danièle Linhart de revenir sur la façon dont le taylorisme s’est imposé comme une doctrine dominante dans les entreprises au cours du XXème siècle, et sur la façon dont il influence aujourd’hui le travail salarié.


Cette conférence a eu lieu le samedi 9 mars à l’Espace Conférences, 2 Bis Rue Mercœur, 75011 Paris.

date
9 mars 2024
heure
14h30
lieu

Espace Conférences – 2bis rue Mercoeur – 75011 – Paris
Inscription obligatoire via ce formulaire.

intervenants

Danièle Linhart, sociologue, directrice émérite de recherche au CNRS, autrice de L’insoutenable subordination des salariés (2021), La Comédie humaine du travail, de la déshumanisation taylorienne à la sur-humanisation managériale (2015), Travailler sans les autres ? (2009).

Les prochains rendez-vous

Menu